"Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'Opinion" Paul Valéry

10 août 2017

Deux psychologues jugés pour leur rôle dans le programme de torture de la CIA après le 11 septembre




Deux psychologues qui ont aidé à concevoir le programme d'interrogatoires de la CIA après le 11 septembre seront jugés pour l'utilisation de méthodes de torture. Trois prisonniers avaient porté plainte. L'un d'eux n'a pas survécu.

James Mitchell et Bruce Jessen, deux psychologues qui avaient participé à la conception du programme d'interrogatoires de la CIA après le 11 septembre, seront jugés en septembre pour avoir encouragé l'utilisation de méthodes de torture tels que la simulation de noyade (waterboarding) ou le fait d'attacher les détenus tout en les maintenant dans des positions douloureuses.

Un tribunal fédéral de l'Etat de Washington a autorisé le 7 août la tenue d'un procès au nom de trois anciens prisonniers, dont l'un est mort dans une prison de la CIA à la suite d'interrogatoires particulièrement durs.

Le tribunal a rejeté les tentatives du gouvernement américain d'obtenir un règlement négocié pour empêcher la tenue d'un procès public, arguant de la nécessité de protéger certains renseignements confidentiels.

Ce procès intenté par l'ACLU, organisation américaine de défense des libertés, sera le premier à porter sur les méthodes de torture utilisées par les autorités américaines pendant la fameuse «guerre contre la terreur».

Les deux psychologues avaient été recrutés par la CIA en 2002. Ils ont reçu un montant de 80 millions de dollars pour avoir conçu et aidé à mener des interrogatoires de suspects capturés, notamment en Afghanistan. Khalid Sheikh Mohammed, le cerveau des attentats du 11 septembre et Abu Zubaydah, autre haut responsable d'al-Qaïda ont fait partie de ces prisonniers.

L'ACLU affirme que Bruce Jessen et James Mitchell sont responsables de tortures illégales à l'encontre des trois plaignants : le Tanzanien Suaniman Abdullah Salim, le Libyen Mohamed Ahmed Ben Soud et l'Afghan Gul Rahman.

Les deux premiers ont été libérés après plusieurs années de détention. Gul Rahman est mort d'hypothermie dans une cellule de la CIA en novembre 2002, après ce que l'ACLU a décrit comme deux semaines de «torture brutale».

«C'est un jour historique pour nos clients et tous ceux qui demandent que les responsables de la torture répondent de leurs actes», a déclaré l'avocat de l'ACLU, Dror Ladin, dans un communiqué.

«La décision du tribunal signifie que, pour la première fois, les personnes responsables du programme brutal et illégal de torture de la CIA seront confrontées aux conséquences judiciaires de leurs actes. Nos clients attendent justice depuis longtemps», s'est encore réjoui l'avocat.

Le tribunal a rejeté les arguments des psychologues, qui niaient être responsables de tous les interrogatoires de la CIA et avoir été impliqués dans les interrogatoires de deux des plaignants en particulier.

Ils ont également affirmé ne pas être à l'origine de décisions spécifiques d'utiliser des «techniques d'interrogatoire renforcées» contre les plaignants, et s'être contentés de fournir à la CIA une liste de méthodes parmi lesquelles l'agence de renseignement américaine pouvait choisir.

Ils ont également souligné que la décision d'utiliser ces méthodes de torture avait été prise par la CIA et approuvée par le ministère de la Justice.